• LA MALBOUFFE, C'EST DE LA BOUFFE TOXIQUE

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    William Reymond : « La malbouffe, c’est de la bouffe toxique »

    Publié le 1 mai 2010 par €ric

     

     

    « Au milieu des années 1980, sans aucune raison apparente, près de 20 millions d’Américains sont, brusquement, devenus trop gros. » Ainsi s’exprime William Reymond, journaliste français vivant aux Etats-Unis, au cœur de ce laboratoire géant de la malbouffe. Diabète, cancers, maladies cardio-vasculaires, tout y passe. Ce n’est plus un cours de cuisine, mais de médecine ! Quand la « junk food » – le mot anglais pour malbouffe – se transforme en « toxic food »…

    Entretien publié dans le n° 37 (mai 2010) du magazine Le Choc du mois, qui vient de paraître. En kiosques ou à commander ici.

    LA MALBOUFFE, C'EST DE LA BOUFFE TOXIQUE

    Le Choc du mois : Vous pensez qu’il ne faut plus parler de malbouffe, mais de «toxic food », pour reprendre le titre de votre dernier livre ? Pourquoi ?

    William Reymond : La « junk food » (malbouffe) est un terme réducteur qui nous installe dans un mensonge : celui de croire que la malbouffe, c’est ce que mange l’autre. Alors qu’en réalité, elle correspond aujourd’hui à 80 % de notre alimentation, soit la part de l’industrie agroalimentaire dans nos dépenses de table.

    Et elle est d’autant plus toxique qu’elle ne nous rend pas que gros. Car cette alimentation, surchargée en gras, sel et sucre, tous facteurs d’obésité, est aussi un vecteur essentiel dans le développement de certains cancers et des maladies cardio-vasculaires et cérébrales, l’obésité n’étant que la face visible de l’iceberg.

     

    Est-ce la raison pour laquelle vous avancez que la nourriture industrielle sera la cigarette du XXIème siècle ?

    Il a fallu plus de cinquante ans pour que la vérité sur la cigarette éclate. Pas par ignorance, mais du fait d’une stratégie de manipulation de l’information par des « génies » des relations publiques.

    Aujourd’hui, l’industrie agroalimentaire – dont le chiffre d’affaires est en France de 163 milliards d’euros, deux fois plus que le secteur automobile ! – s’inspire de ces méthodes pour camoufler sa responsabilité dans l’énorme crise sanitaire en cours, qui dépasse largement le cadre de la prise de poids.

    Notre alimentation crée le diabète de type 2, qui touchait jadis les vieillards et frappe aujourd’hui des enfants. Certains cancers comme ceux du colon, de la prostate, du sein – y compris chez l’homme – sont partiellement liés à notre mode alimentaire.

    Nous le savons d’autant mieux que les pays qui ne s’alimentent pas comme nous, ne sont pas confrontés à ces maladies. On a pu l’observer en Chine. Les zones rurales, pas concernées par notre modèle alimentaire, ne sont pas affectées. Pas les régions qui ont adopté notre régime alimentaire.

     

    Qu’y a-t-il dans ces aliments qui désarme à ce point nos défenses ?

    En 1976, un jeune chercheur, Anthony Sclafani, a laissé tomber par inadvertance une poignée de Fruit Loops, une céréale fortement sucrée, dans la cage d’un rat de laboratoire. L’animal (dont la structure ADN est très proche de la nôtre) s’est précipité dessus, sans s’assurer si les lieux étaient sûrs, ce que les rats font communément, étant une espèce très prudente. Sclafani a répété cette expérience avec toutes sortes de nourriture industrielle. Le résultat fut le même. Ignorant les risques, les LA MALBOUFFE, C'EST DE LA BOUFFE TOXIQUErats se précipitaient. Pire : alors que le poids de ces rongeurs s’autorégule, les rats de Sclafani devenaient obèses.

    C’est que l’alimentation industrielle « neutralise » les mises en garde de notre cerveau, entraînant une surconsommation et donc une prise de poids… malgré nous. Notre ADN a une faiblesse pour le gras et le sucré. C’est directement lié à l’évolution de l’espèce humaine et à notre instinct de survie.

    Les industriels investissent des centaines de millions de dollars en recherche pour concevoir des produits auxquels nous ne pourrons pas résister. Cela va du neuromarketing (des publicités qui s’adressent directement à notre pulsion d’achat) à la stimulation de ressorts biologiques.

    Ce qui préside aux choix de ces aliments, c’est d’abord la baisse des coûts de fabrication. On le vérifie avec le sirop de fructose-glucose et les acides gras trans. Késako ?

    Le sirop de fructose-glucose est un produit synthétique fabriqué à partir des excédents de maïs ou de blé. Il a un fort pouvoir sucrant, permet de conserver les aliments plus longtemps et de protégerLA MALBOUFFE, C'EST DE LA BOUFFE TOXIQUE les plats surgelés de la morsure du froid. Plus décisif encore aux yeux de l’industrie agroalimentaire : il ne coûte pas cher. Raison pour laquelle on le retrouve partout, du pain aux yaourts, en passant par la plupart des plats préparés.

    Le hic, c’est que son apparition a coïncidé avec la crise mondiale d’obésité. Non seulement ce « sirop » n’est pas assimilé par l’organisme, mais il contourne le sentiment de satiété de notre cerveau. En gros, notre cerveau ne le reconnaît pas et ne nous envoie pas de message de mise en garde lorsque nous le surconsommons. Des études démontrent aussi son rôle dans la formation du mauvais cholestérol. Un produit à éviter donc.

    Or, aujourd’hui, chaque Américain en ingurgite près de 40 kg par an. Les acides gras trans présents dans l’huile hydrogénée permettent de conserver certains aliments ou de les rendre plus croustillants. Peu coûteux, on les trouve dans les viennoiseries et les barres de chocolat. Ils sont responsables de problèmes cardio-vasculaires entraînant près de 100 000 morts par an aux Etats-Unis. Aujourd’hui, l’ado français en consomme autant qu’un ado américain.

     

    Il faut corriger deux impressions fausses, selon vous. D’abord la valeur nutritionnelle des produits…

    LA MALBOUFFE, C'EST DE LA BOUFFE TOXIQUELa valeur nutritionnelle d’un fruit ou d’un légume, ce sont les vitamines, minéraux et autres éléments essentiels qu’ils contiennent. Or, nous savons qu’elle est en baisse. Concrètement, cela veut dire que si vous voulez consommer la même quantité de vitamine C contenue dans une orange cultivée en 1960, vous devez aujourd’hui en manger… six.

    Aucun produit n’est épargné par cet appauvrissement directement lié au mode de culture intensif. La viande est devenue plus grasse et moins riche. Les produits laitiers, plus gras aussi, ont vu leur taux de calcium chuter. Tout décroît, sauf un élément : l’eau.

     

    Autre fausse impression : l’abondance de produits dans les grandes surfaces…

    On a référencé 575 variétés de pommes de terre. Or, on en cultive principalement deux. Pourquoi ? Le premier acheteur de pommes de terre au monde est McDonald’s. Il exige une seule variété de pomme de terre, la Burbank. Celle qui résiste le mieux à la congélation et à la friture à haute température. Le second est l’industrie des chips. La Ranger répond à ses besoins. C’est la pomme de terre la plus riche en sucres. Une fois cuite dans l’huile, puis trempée dans le sel, elle devient une arme fatale pour notre ADN.

    Résultat : les producteurs cultivent principalement ces deux variétés. Cet exemple n’est pas anodin. La pomme de terre, aujourd’hui le légume le plus consommé aux Etats-Unis, est à sa manière le symbole de la pandémie d’obésité.

     

    A qui faire confiance ? Les industriels sont juge et partie, ils financent désormais la recherche censée établir l’innocuité de leurs produits. Cela touche même des institutions publiques comme le Credoc…

    La confusion des genres est une stratégie délibérée de l’industrie alimentaire, comme elle a été employée par les géants du tabac.

    J’espère que mon livre sera un outil pour y voir plus clair. J’y raconte effectivement comment le Credoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie), publiant une étude sur la nécessité de s’hydrater, recommande de boire de l’eau, mais pas seulement. Et pour cause ! Coca-Cola est partenaire de l’étude. Autrement dit, Coca-Cola n’est plus le fabricant d’une boisson saturée en sucre – et donc responsable de la pandémie d’obésité –, mais un spécialiste de l’hydratation !

     

    Que faire ? Vous avez adopté, quant à vous, un régime alimentaire de type « flexitarien». En quoi consiste-t-il ?

    Cela consiste à reprendre le contrôle de nos assiettes. Initier nos enfants aux plaisirs de la table, des courses jusqu’à la dégustation, en passant par la préparation. Le flexitarisme est un mode alimentaire où, si la viande est présente, elle ne tient pas la place principale. Des fruits, des légumes, des produits complets et un peu de viande pour compléter le tout.

     

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    A lire :

    • William Reymond, Toxic food – Enquête sur les secrets de la nouvelle malbouffe, Flammarion, 2009

    • William Reymond, Toxic – Obésité, malbouffe, maladies : enquête sur les vrais coupables, Flammarion, 2007

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